31 octobre 2005

Effet pervers de la dualité des ordres de juridiction en France

Le partage entre les deux ordres de juridiction (juridictions de l'ordre administratif et juridictions de l' ordre judiciaire) sur lesquels repose l'organisation juridictionnelle française est source de dysfonctionnements peu compatibles avec le "délai raisonnable" de la Convention européenne des droits de l'homme. La décision de la Cour de cassation (Cass. civ. 1re) du 22 mars 2005 en donne une nouvelle illustration. Comme dans d'autres cas sanctionnés par la Cour européenne des droits de l'homme, il s'agit au départ du licenciement contesté d'un salarié protégé. Cette fois l'arrêt, qui est promis aux honneurs du rapport annuel de la Cour de cassation, soulève un problème structurel de la garantie offerte au justiciable par l'article L. 784-1 du Code de l'organisation judiciaire concernant la mise en oeuvre de la responsabilité du fait du fonctionnement défectueux du service de la justice.

Pour aller plus loin : Gazette du Palais n° 279 du 6 octobre 2005, p. 10

10 octobre 2005

Simplifier notre droit et réduire la bureaucratie

Dans le cadre de sa politique de simplification du droit, des procédures et des formalités administratives, le gouvernement se propose "d'améliorer la clarté et l’intelligibilité du droit".

L'objectif est de :
- alléger des formalités trop complexes demandées à l’usager en supprimant des procédures inutiles, en regroupant des services dans des guichets uniques, en développant l’usage des nouvelles technologies de l’information ;
- améliorer l’efficacité des administrations par la suppression d’organismes consultatifs inutiles ;
- clarifier le droit pour diminuer les risques de contentieux et améliorer la sécurité juridique ;
- poursuivre et développer la codification du droit pour le rendre plus accessible.

Ainsi depuis 2003, nous avons vu apparaître deux série de lois et une troisième est en préparation.

La première loi de simplification du droit est celle du juillet 2003. Elle a habilité le gouvernement à prendre des mesures par ordonnances ‎dans de nombreux domaines :
- simplification des démarches des particuliers en matière, par ‎exemple, de vote par procuration de la vie administrative,
- suppression de nombreuses ‎commissions administratives devenues sans objet,
- création du titre emploi-entreprises.‎

La seconde loi de simplification du 9 décembre 2004 poursuit et amplifie ce travail de simplification du droit par ordonnances :
- simplification des procédures concernant les usagers comme le permis de construire, les aides personnelles au logement, les dons et legs aux associations ;
- mise en place d’un service de déclaration en ligne de changement d’adresse et création d’un dossier unique informatique personnel dématérialisé ;
- mesures spécifiques en faveur des entreprises et notamment l’amélioration des garanties accordées au contribuable et au cotisant social.

Cette loi prévoit également la création ou la refonte de 14 codes. Il permet d’adopter le code de ‎l’administration, le code du sport, le code des transports, le code de la commande publique et le code ‎général de la fonction publique. Il autorise aussi la refonte du code de l’expropriation et du code de justice ‎militaire.

D’autres actions de simplifications ne sont pas du ressort de la loi et sont mises en œuvre par décrets, circulaires ou par l’adoption de meilleures pratiques de gestion.

Une troisième loi de simplification est en cours de préparation en 2005 et vise plus particulièrement six catégories d’usagers : familles, élus locaux, associations, entreprises, investisseurs étrangers. En mars 2005 devrait se tenir des « Etats généraux de la simplification », manifestation qui ‎annoncerait la préfiguration du PLH3 dont la finalisation est prévue pour le second trimestre ‎‎2005.‎


Pour plus d'information :
- Site de la Délégation aux Usagers et aux Simplifications Administratives

06 octobre 2005

Les avocats obtiennent que la loi Perben soit modifiée

Un accord entre les avocats et la chancellerie a été trouvé, à la suite de l'affaire France Moulin : mise en examen pour "révélation d'informations issues d'une instruction en cours", nouveau délit créé par la loi Perben du 9 mars 2004 sur la criminalité, cette avocate toulousaine avait subi vingt-trois jours de détention provisoire, provoquant une forte mobilisation de la profession au mois de mai.

L'article 434-7-2 du code pénal, en cause dans l'affaire Moulin, a été réécrit. A l'occasion, d'autres dispositions contestées par les avocats, en matière d'écoutes et de perquisitions, ont également été amendées.

L'article 434-7-2 du code pénal punit de cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende le fait de révéler, "directement ou indirectement" , une information issue d'une enquête en cours à des personnes pouvant être impliquées.

Les avocats ont fait valoir que le texte, trop large, était dangereux pour les droits de la défense, puisqu'il permet notamment au juge de placer un avocat en détention provisoire.

A l'avenir, le délit ne sera constitué que si l'auteur agit "sciemment" , s'il parle à une personne dont il sait qu'elle va être mise en examen, et si la révélation est faite "dans le dessein d'entraver" les investigations en cours. La peine encourue sera ramenée à deux ans, ce qui exclut la détention provisoire. Par exception, le délit demeurera puni de cinq ans d'emprisonnement s'il survient dans le cadre d'une enquête sur des faits de criminalité organisée (punis de dix ans d'emprisonnement).

Les textes régissant les écoutes dites "incidentes" ont aussi été modifiés : actuellement, la conversation d'un avocat avec les proches d'un client, eux-mêmes placés sur écoute, peut être versée au dossier d'instruction. C'est sur la foi de telles écoutes qu'une avocate de Laon, Catherine Maizière, a été renvoyée devant le tribunal correctionnel de Compiègne pour violation du secret de l'instruction. Mardi 6 septembre, Me Maizière a été reconnue coupable mais dispensée de peine ; elle a fait appel.

Les perquisitions dans les cabinets d'avocats et les locaux de leurs ordres professionnels seront mieux encadrées. Elles nécessiteront une ordonnance motivée du juge d'instruction, qui devra préciser ce qu'il recherche, et qui sera transmise au bâtonnier. Dans le cas des ordres, une autorisation préalable du président du tribunal de grande instance sera nécessaire. Le juge ne pourra plus saisir d'autres pièces que celles visées. Et les policiers qui l'accompagnent ne pourront plus prendre connaissance des documents présents.