25 novembre 2005

Victimes des violences urbaines : Les premières démarches

De nombreux quartiers sont touchés, depuis plusieurs jours, par des violences qui ont fait de nombreux dégâts matériels, ainsi que des victimes d’agressions.

Si vous avez été la victime d’une dégradation de vos biens ou d’une agression, vous trouverez ci-dessous les premières démarches à effectuer pour être indemnisé.

æ Soutien de première urgence : qui contacter ?

Si vous (ou l’un de vos proches) avez été victime de violences, d’une dégradation ou d’un vol, vous pouvez avoir besoin d’un soutien et d’une première orientation dans vos démarches, immédiatement ou dans les jours, voire dans les semaines, qui suivent l’événement.

En appelant le O8VICTIMES, soit le 08 842 846 37, vous serez écoutés, informés sur vos droits et orientés vers les services dont vous avez besoin.

Vous serez mis en relation avec des professionnels capables d’évaluer vos besoins. En fonction de votre appel, serez informés sur les démarches à entreprendre ou encore mis en relation avec l’association d’aide aux victimes la plus proche de votre domicile.

Ce numéro est accessible 7 jours sur 7 de 9 heures à 21 heures, au prix d’un appel local.

La liste de ces associations est également disponible sur le site du Ministère de la justice : justice.gouv.fr


æ Pour suivre l’évolution de votre procédure et connaître la date de l’audience il est possible de vous adresser :

- soit au commissariat de police ou à la gendarmerie en charge de l’affaire ;
- soit au « bureau d'ordre du parquet » du tribunal de grande instance de votre département (si la plainte a déjà fait l'objet d'une transmission au procureur) qui peut vous renseigner sur le service saisi et la date de l’audience.
- coordonnées des tribunaux


æ Vous êtes victime de dommages matériels
Incendie de votre véhicule, incendie de votre commerce, vol, dégradations, etc.

INDEMNISATION : LES DEMARCHES A EFFECTUER

æ Indemnisation par votre assurance

1. Pour être indemnisé, il vous faut effectuer, dans les 5 jours suivant les événements, une déclaration de sinistre.

Celle-ci doit être adressée par écrit au représentant ou l’agent général de votre assurance, dont les coordonnées sont indiquées sur votre contrat d’assurance. Vous devrez fournir un certain nombre d’informations. Rassemblez tout ce qui peut justifier de l’existence et de la valeur des biens dégradés ou détruits (facture d’achat ou autre pièce justificative).

2. Il est fortement souhaitable que votre déclaration de sinistre soit accompagnée de la copie de votre plainte.

Vous pouvez déposer plainte auprès du commissariat ou de la gendarmerie les plus proches de votre domicile. Un récépissé de votre plainte doit vous être remis à l’issue de son dépôt.

3. L’indemnisation que vous pourrez recevoir dépend des garanties de votre contrat d’assurance :

- si votre véhicule a été incendié : votre contrat d’assurance doit comporter une « garantie incendie », pour ouvrir droit à indemnisation de la part de votre assurance ;
- si votre commerce a été incendié : les dégâts consécutifs à un mouvement populaire sont assurés. En revanche, les vols commis lors de ces émeutes ne le sont pas systématiquement. Cette information est à vérifier auprès de votre assurance.


Attention !
L’indemnisation est fonction des garanties de votre contrat d’assurance, de l’application éventuelle d’une franchise (somme restant à la charge de l’assuré. Son montant peut être fixe ou proportionnel au montant des dommages) et de l’évaluation de la valeur du bien dégradé ou détruit. Seul votre assureur est en mesure de vous donner des précisions à cet égard.

4. Si votre contrat contient la garantie «protection juridique», renseignez-vous auprès de votre assureur, afin de connaître les services juridiques effectivement pris en charge.

Vérifiez notamment dans quels types de litiges l’assureur intervient (civil, pénal, etc.) et les limites de prise en charge des honoraires d’avocat.

æ Indemnisation par voie de justice

§ Indemnisation par l’auteur des faits

Si l’auteur de la dégradation de votre bien est connu, et qu’il a été appréhendé par les forces de l’ordre, il pourra être poursuivi par la justice.

S’il est reconnu coupable, il peut être condamné à vous verser des dommages et intérêts, en réparation de la dégradation de votre bien.

Pour ce faire, il vous appartient de rapidement porter plainte, et de vous constituer partie civile. Vous pouvez vous constituer partie civile au cours du dépôt de votre plainte, mais aussi au cours de l’audience de jugement de l’auteur des dégradations dont vous êtes victime.

Si l’auteur des faits est mineur, ces mêmes démarches doivent être effectuées auprès du Tribunal pour enfants.

Attention !

La plupart des personnes poursuivies devraient comparaître en « comparution immédiate », dans la journée ou le lendemain de leur arrestation.

Si vous êtes victime, il est important de vous constituer partie civile au plus vite, afin de faire valoir vos droits à réparation, au cours de l’audience de comparution immédiate.

Pour vous orienter dans ces démarches, vous pouvez contacter une association d’aide aux victimes. Vous pouvez également prendre contact avec la permanence du barreau (ordre des avocats), tenue dans le Tribunal de grande instance le plus proche de chez vous.

§ Indemnisation par la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions, CIVI

Il est possible, dans certains cas, de saisir la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (ou « CIVI ». Article 706-14 du code de procédure pénale) pour une demande d’indemnisation.

Cette procédure n’est cependant ouverte que si vous vous trouvez dans une situation matérielle ou psychologique grave, du fait de l’atteinte à votre bien.

L’indemnisation prévue est par ailleurs plafonnée.

Pour saisir la CIVI, vous devez vous renseigner auprès du secrétariat de la CIVI siégeant au Tribunal de grande instance de votre domicile ou du lieu où les faits ont été jugés. Vous pouvez également vous faire aider par l’association d’aide aux victimes de votre région.

Vous pouvez en savoir plus en téléchargeant le formulaire de saisine (au format PDF)


æ Vous êtes victime de dommages corporelsCoups, blessures, etc.

LES AIDES ET LES SOUTIENS DE PREMIERE URGENCE

Pour être soutenu dans les difficultés que vous rencontrez, des professionnels sont à votre écoute.

Les associations d’aide aux victimes agréées par le ministère de la Justice interviennent gratuitement et pourront vous proposer un accompagnement et une première orientation, au mieux de votre situation personnelle.

LES DEMARCHES A EFFECTUER

æ Indemnisation par les assurance

En ce qui concerne l’indemnisation des dommages corporels, vous devez vous référer à votre contrat d’assurance.

Votre compagnie prend en charge vos dommages, si vous avez souscrit une garantie des accidents de la vie, un contrat individuel accident ou une assurance vie (à condition qu’elle comporte une garantie en cas d’arrêt de travail et d’invalidité).

æ Indemnisation par voie de Justice

L’auteur de votre agression est responsable de la réparation de votre dommage. Pour faire valoir votre droit, vous pouvez porter plainte, et vous constituer partie civile (voir ci-dessus).

Vous pouvez également saisir la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (voir également ci-dessus).

Cette procédure est soumise à conditions. En effet, vous pourrez obtenir une indemnisation si vos blessures ont entraîné une incapacité totale de travail égale ou supérieure à un mois (article 706-3 du code de procédure pénale). Si votre préjudice a entraîné une incapacité totale de travail inférieure à un mois, la saisine est soumise aux conditions vues plus haut : vous vous trouvez, du fait de l’infraction que vous avez subie, dans une situation matérielle ou psychologique grave.

Dans tous les cas, vous pouvez suivre l’état de la procédure de la même manière qu’indiqué plus haut.

Violences urbaines : état d’urgence prolongé jusqu'au 21 février 2006


L’état d’urgence est prolongé pour trois mois à compter du 21 novembre 2005 sur l’ensemble du territoire français métropolitain. A noter : le gouvernement peut mettre un terme à l’état d’urgence avant l’expiration de ce délai de trois mois. C’est ce qu’indique une loi publiée au Journal officiel samedi 19 novembre 2005.

L'état d'urgence avait été instauré mercredi 9 novembre 2005 pour 12 jours et dans 25 départements par un décret du ministère de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire. Depuis le 27 octobre en France, certains quartiers ont été touchés par des violences avec dégâts matériels et victimes d’agressions.

Loi du 18 novembre 2005 prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955, Sur le site legifrance.com

Dossier "Violences urbaines", Sur le site du ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire

Violences urbaines : état d’urgence dans 25 départements, Actualité « service-public.fr »

Clause pénale : qui peut, mais ne veut, ne doit pas !

Qu'est-ce qu'une clause pénale ? Clause d'un contrat fixant par avance le montant de la pénalité que devra verser l'une des parties à l'autre, dans le cas où elle ne respecterait pas ses engagements contractuels. Elle peut être augmentée ou réduite par le juge.

Le code civil (articles 1152 et 1229 du Code civil) définit la clause pénale comme « celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution ». Ainsi, le créancier d’une obligation a-t-il la possibilité d’insérer dans un contrat une telle clause afin dese prémunir contre l’éventuelle non-exécution de la part de son débiteur. Les avantages d’une telle clause résident dans le fait d’une part, que le montant mentionné est fixé de façon forfaitaire et que par là-même il évite toute difficulté quant à l’évaluation du préjudice et d’autre part que la clause figurant au contrat avant la survenance de tout litige informe l’autrepartie des dangers afférents à la non-exécution de ses obligations ce qui peut avoir un effet dissuasif.

Néanmoins, ce type de clause ne peut être utilisé de façon abusive plus particulièrement lorsqu’il existe une différence de pouvoir économique entre les parties au contrat. Ainsi, les clauses léonines ont-elles été dénoncées et les juges disposent-ils aujourd’hui d’un pouvoir de modération quant au montant fixé forfaitairement dans la clause. Il s ‘agira d’apprécier les conditions de validité de telles clauses ainsi que le pouvoir d’appréciation des juges en la matière.

La clause pénale ne trouve pas à s’appliquer dans diverses hypothèses énumérées comme suit :
- lorsque le contrat principal est déclaré nul, il s’ensuit que la clause pénale n’est plus applicable.
- lorsque la loi prohibe l’insertion de telles clauses (c’est notamment le cas dans les contrats de travail ou encore les baux d’habitation).
- lorsqu’il est fait échec à des dispositions impératives. C’est ainsi qu’une clause pénale ne pourrait venir mettre en échec un taux d’intérêt fixé légalement.

De même, ne constitue pas une clause pénale l'indemnité ne sanctionnant pas l'inexécution d'une obligation contractuelle.

Voici un exemple :

Un contrat de plan d'épargne populaire est souscrit auprès d'une banque. Une des clauses stipule qu'en cas de retrait de fonds ou de transfert dans un autre établissement avant la fin de la huitième année, les intérêts ne seront pas entièrement versés et que sera pratiquée, sur les intérêts calculés, une reprise de 50% en cas de retrait durant les quatre premières années et de 20% en cas de retrait de la cinquième année à la huitième année. L'épargnante demande le transfert auprès d'un autre établissement bancaire. Se prévalant de la clause stipulée, la banque procède à une reprise d'intérêts d'un certain montant. Opposée à cette reprise, l'épargnante conteste alors la validité de la clause et réclame le remboursement de la somme non versée. Les juges d'appel condamnent la banque à rembourser une certaine somme au motif que la stipulation litigieuse constitue une clause pénale.

C'est sans surprise que les juges du droit cassent (décision : Cass. 1re civ., 12 juill. 2005, n° 00-18.543, P B) cet arrêt au visa des articles 1152 et 1229 du Code civil: la cour d'appel avançait "des motifs qui établissaient que le transfert constituait une faculté ouverte à l'épargnant, en sorte que l'indemnité forfaitaire convenue par avance ne sanctionnait pas l'inexécution d'une obligation contractuelle". Ce n'est que la confirmation que la clause pénale suppose l'inexécution d'une obligation contractuelle (Cass. 1re civ., 24 nov. 1993, n° 91-16.150, RTD civ. 1994, p. 857, obs. Mestre J.).

24 novembre 2005

Violences urbaines : dossier en ligne sur l'aide aux victimes

Le ministère de la Justice a mis en ligne jeudi 10 novembre 2005 sur son site Internet une série d'informations pratiques pour aider les victimes des violences urbaines dans leurs premières démarches. Depuis le 27 octobre en France jusqu'à ces jours derniers, certains quartiers ont été touchés par des violences avec dégâts matériels et victimes d’agressions.

Ces informations portent notamment sur les personnes à contacter pour les soutiens de première urgence mais aussi sur les démarches à entreprendre en cas de dommages corporels et/ou matériels afin de bénéficier d’indemnisations.La plateforme téléphonique du ministère pour l’aide aux victimes, le 08VICTIMES (08 842 846 37) fonctionne 7 jours sur 7 de 9h00 à 21h00.

Actualités service-public.fr :
Violences urbaines : état d'urgence dans 25 départements

Sur le site du ministère de la Justice :
Victimes des violences urbaines, premières démarches

Sur le site du Premier ministre :
Questions-Réponses : quelles indemnisations pour les victimes des violences urbaines ?

Actualités service-public.fr :
Aide aux victimes : "08VICTIMES", nouveau service téléphonique

16 novembre 2005

Etrangers et expulsions

Le Ministre de l'intérieur vient de demander aux Préfets d'expulser les étrangers interpellés depuis le début des violences urbaines.

Sur les près de 2000 personnes interpellés, cette mesure ne concernerait que 120 personnes pour la plupart en situation régulière (en final seulement 1à procédures d'expulsion ont été engagées).

Que dit le droit sur la question ?

Le texte de référence en la matière reste le Code de l'Entrée et de Séjour des étrangers en France et du droit d'asile (CESEDA), entrée en vigueur le 1er mars 2005.

L'éloignement des étrangers recouvre deux cas:

1) le cas des étrangers en situation irrégulière:

Il s'agit de ceux qui sont en France sans visas ou sans titre de séjour valide.

Deux possibilités s'offrent à l'administration dans ce cas :

- le Préfet ou le Ministre de l'intérieur peuvent prendre un arrêté d'expulsion
- le Préfet peut prendre un arrêté de reconduite à la frontière (APRF)

2) le cas de l'étranger en situation régulière :

Dans ce cas, seul la procédure d'expulsion prévue à l'article L. 521-1 à 4 est envisageable.

Quelles sont les règles en vigueur en matière :

1) d'expulsion

Le principe : L'étranger majeur peut être expulsé si sa présence constitue une "menace grave à l'ordre public".

Mais le Code protège contre l'expulsion non seulement les mineurs de 18 ans, mais aussi certaines catégories d'étrangers qui ont des attaches familiales très fortes en France.

La protection contre l'expulsion ne pourrait tomber :

- dans le cas de parents d'enfant français mineur, de conjoint d'un Français depuis au moins deux ans, de l'étranger résident en France depuis plus de 10 ans, de ceux titulaire d'une rente d'accident de travail d'un organisme français ou d'une maladie professionnelle :

L'Administration doit prouver qu'il y a nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique OU que l'étranger a été condamné à plus de 5 ans de prison ferme.

- dans le cas de l'étranger vivant en France depuis l'âge de 13 ans, de celui qui y réside depuis 20 ans au moins, de celui qui est marié à un étranger résident régulièrement en France depuis 3 ans, de parents d'un enfant français mineur

2) de reconduite à la frontière

Dans les deux cas, il s'agit d'un acte administratif qui peut être soumis au contrôle de la légalité du juge administratif.

Le juge compétent en matière de l'éloignement des étrangers reste le Conseil d'Etat

12 novembre 2005

Juristes et profession d'avocat

Décret n° 2005-1381 du 4 novembre 2005 modifiant l'article 98 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat

Le texte dispense désormais de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat "les juristes salariés d'un avocat, d'une association ou d'une société d'avocats, d'un office d'avoué ou d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle en cette qualité postérieurement à l'obtention du titre ou diplôme".

11 novembre 2005

Avocats, oser les bons choix

Renforcer la profession serait s'engager dans la défense des intérêts du public et des libertés.

Par Pierre CONIL, Tiennot GRUMBACH, Claude MICHEL et Jean-Luc RIVOIRE
Liberation, vendredi 04 novembre 2005

Pierre Conil est président du Syndicat des avocats de France ; Tiennot Grumbach, Claude Michel et Jean-Luc Rivoire sont militants du SAF.

En n'osait pas jusqu'ici menacer de «kärchériser» les banlieues déshéritées ou dénoncer, à médias que veux-tu, la «racaille» des jeunes qui y vivent. Désormais, les choses sont plus claires : un gouvernement de droite applique une politique de droite et fait primer ouvertement la sécurité menacée sur les libertés confisquées, les intérêts des milieux d'affaires sur les droits sociaux, comme l'illustre le détricotage insidieux du droit du travail.

Il s'agit d'une mutation aussi profonde que subtile. Si le socle républicain subsiste, les dérogations de plus en plus nombreuses aux sûretés individuelles inquiètent. Elles tirent prétexte d'une part de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée et d'autre part du chômage et des contraintes de la mondialisation de l'économie. Les discriminations se renforcent au détriment de certaines catégories de la population, faute de crédits ou de volonté politique pour surmonter les obstacles culturels, religieux et sociaux. L'école ne remplit plus suffisamment sa fonction d'égalité et son rôle d'ascenseur social.

Le discours provocateur du ministre de l'Intérieur, candidat à la magistrature suprême, montre chaque jour mieux jusqu'où la droite est susceptible d'aller dans l'autoritarisme politique et l'ultralibéralisme économique. A l'approche des échéances électorales majeures, il n'est que trop temps que les forces politiques qui aspirent au changement définissent leur programme et tracent les limites à ne pas dépasser : non-rétroactivité des lois, respect du juge, rôle prééminent de la loi, légalité des peines, droits de la défense, consécration des droits sociaux fondamentaux, rejet de toutes discriminations, respect du droit d'asile, etc. Les mesures qui garantissent la sécurité doivent être strictement nécessaires et les restrictions de liberté doivent être temporaires et respecter le principe de proportionnalité.

Comment les avocats peuvent-ils s'inscrire dans ce débat qui recouvre l'essentiel de leur activité professionnelle. 4 000 d'entre eux, rassemblés à Marseille par le Conseil national des barreaux (CNB), soit près d'un dixième des quelque 44 000 avocats français, ont exprimé les 21 et 22 octobre, devant les représentants des pouvoirs publics et des milieux économiques, leurs aspirations et principales revendications.

Les ovations faites au discours du président, Michel Bénichou, ont permis de mettre en relief le socle commun à l'ensemble des avocats dans nombre de domaines. Cependant, les compromis orchestrés sur l'article 437-4-2 du code pénal, issu de la loi Perben II, qui permet dans certains cas la détention provisoire d'un avocat à l'occasion de l'exercice de sa fonction de défense, ont été minimisés. Dans sa rédaction nouvelle convenue avec le gouvernement, cet article continuera à peser sur la liberté de la défense. Les insuffisances de l'action en faveur d'une réforme profonde de l'aide juridictionnelle sont criantes. Le mouvement vers l'élargissement de la profession aux juristes d'entreprise a, par ailleurs, subrepticement reçu un coup de pouce.

Pourtant, les contradictions qui traversent la profession ne cessent de s'accroître. On ne peut que constater la diversité des spécialisations, la différence des modes d'exercice (de l'avocat individuel aux grandes firmes internationales), la diversification des réseaux de clients socialement éloignés. La distorsion des niveaux de revenus s'aggrave. La répartition des charges d'intérêt public (aide juridictionnelle et commissions d'office) est de plus en plus inégale. Ceux qui s'engagent dans la défense des personnes et des libertés doivent affronter les incertitudes de l'avenir, au regard des carrières vite gratifiantes de ceux qui rejoignent les firmes et se concentrent sur le droit de l'entreprise. On ne donne cependant une assise forte et durable à la défense des intérêts d'une profession libérale que si on démontre, bien au-delà de l'horizon étroitement corporatiste, son rôle dans la défense des intérêts du public et des libertés et le concours qu'elle peut donner à la satisfaction des besoins des gens dans son domaine de compétence.

Quel assourdissant silence à Marseille sur ces sujets qui divisent ! On ne peut continuer de faire comme si cette profession pouvait être unie sur tout. Les avocats qui la composent ne s'engagent-ils pas, quotidiennement, et souvent avec conviction, dans la défense d'intérêts, de logiques et de valeurs contradictoires. Ces contradictions majeures ne sont-elles pas au coeur même de notre société démocratique ? Si le postulat d'un accès au droit et à la justice pour tous a été posé, le CNB ne reprend aucune des propositions qui conditionnent une véritable réforme, à savoir un important relèvement des plafonds d'accès à l'aide juridictionnelle et une véritable rémunération des avocats intervenant à ce titre.

Bien que le président de la République se soit prononcé en faveur d'une action de groupe au profit des associations pour les petits litiges, on n'a pas entendu beaucoup de professionnels du droit affirmer leur soutien à cette mesure favorable aux victimes des grandes sociétés de production et de services. L'extension de cette procédure, dans tous les domaines où la société civile est structurée par de grandes associations représentatives ou des syndicats, aurait l'avantage de désencombrer les tribunaux des affaires répétitives que l'on appelle, à tort, les contentieux de masse.

Alors que la Cour de cassation a réussi le tour de force de modifier sa fonction normative par une utilisation intense de la nouvelle procédure de non-admission des pourvois (actuellement 47 % des dossiers en pâtissent devant la chambre sociale), les protestations contre ce changement dans l'équilibre des institutions restent inaudibles...

Le gouvernement revient sur les protections des travailleurs notamment avec le contrat nouvelles embauches (CNE) qui porte à deux ans la période d'essai permettant une procédure expéditive de licenciement. Si on doit constater que la majorité des avocats en droit social est désormais à la barre pour défendre les intérêts des entreprises, il est cependant possible pour les avocats qui défendent les travailleurs, comme l'induit l'arrêt du Conseil d'Etat du 19 octobre 2005, de bâtir une défense efficace des salariés concernés devant les conseils de prud'homme. Il n'y a pas lieu de baisser les bras.

Les mouvements sociaux prennent de l'ampleur. Pourquoi le CNB ne prendrait-il pas l'attache des organisations syndicales représentatives des salariés pour débattre de leurs propositions. A l'occasion de diverses manifestations, le CNB rencontre les dirigeants du Medef ou des personnalités du monde des affaires ; pourquoi ne pas rencontrer aussi les dirigeants syndicaux ? Qu'ont fait les représentants des avocats dans la délégation de l'UNAPL au Conseil économique et social ?

La violence urbaine semble tourner à la révolte. Ne devons-nous pas réfléchir davantage à la difficulté de porter la revendication du droit à l'intégration et à l'égalité de traitement, parallèlement à notre mobilisation en faveur des droits de la défense des étrangers en situation irrégulière ?

Si l'unité autour d'un CNB qui fédère la profession d'avocat est une bonne chose, il faut aussi que soient élus dans cette assemblée représentative de la profession au niveau national, qui va être prochainement renouvelée, des femmes et des hommes qui prennent la parole au nom du refus de la gestion de la pénurie, des avocats qui affirment que ce n'est pas la loi d'orientation des lois de finances (LOLF) qui doit faire le budget de la chancellerie, mais des choix stratégiques d'«économie politique de la Justice» pour que celle-ci puisse répondre aux demandes réelles des citoyens.

Un tel «engagement» de très nombreux avocats pour faire entendre la parole des couches populaires donnera sens et renforcera l'utilité sociale de la profession d'avocat tout entière.

10 novembre 2005

Respect des droits lors d'un contrôle d'identité

Le contrôle d'identité consiste à exiger d'une personne qu'elle justifie de son identité. Seuls les policiers, les gendarmes et dans certains cas les douaniers peuvent y procéder, dans des conditions définies par la loi.

Dans quels cas les contrôles d'identité peuvent-ils avoir lieu ?

1) Les contrôles préventifs :

Les agents et officiers de police judiciaire peuvent effectuer des contrôles d'identité dans les lieux publics (rue, gare...) à l'égard des personnes dont un indice laisse penser qu'elles :
- ont commis ou tenté de commettre une infraction.
- se préparent à commettre un crime ou un délit.
- sont susceptibles de fournir des renseignements sur un crime ou un délit.
- font l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.

2) Les contrôles effectués par les agents des douanes :

Dans les quatre cas précédemment énumérés, les douaniers peuvent procéder à des contrôles si vous vous trouvez, soit, à moins de 20 km d'une frontière, soit, dans les ports, aéroports, gares routières et ferroviaires ouverts au trafic international.

3) Les contrôles effectués à l'initiative du procureur de la République :

Sur réquisition écrite du procureur de la République, la police peut effectuer des contrôles dans les lieux et pour une période de temps déterminés par le procureur. Dans ce cas, toute personne peut être contrôlée, même s'il n'existe aucun indice laissant présumer que cette personne a commis une infraction.

ATTENTION : la police peut procéder à une vérification des titres de séjours des
étrangers en dehors de tout contrôle d'identité. La vérification peut alors avoir lieu dès que les policiers peuvent présumer que la personne est de nationalité étrangère. Pour éviter les discriminations, cette procédure est très encadrée et la présomption en question ne peut reposer que sur des éléments objectifs extérieurs à la personne. Ainsi, la vérification ne peut être justifiée par l'apparence physique de la personne (couleur de la peau, morphologie…). En revanche, la participation à une manifestation, la conduite d'un véhicule immatriculé à l'étranger ou le port d'un livre écrit en langue étrangère, sont des éléments objectifs extérieurs à la personne.

Comment justifier de son identité ?

Lors d'un contrôle, vous avez l'obligation de justifier de votre identité. La carte d'identité n'est pas obligatoire et la justification de l'identité de la personne contrôlée peut se faire par tout moyen : titre de séjour, passeport, permis de conduire, livret de famille, appel à témoignage...

Qu'est-ce que la vérification d'identité ?

La personne qui refuse ou se trouve dans l'impossibilité de décliner son identité, peut faire l'objet d'une vérification d'identité. Celle-ci ne peut être effectuée que par un officier de police. La personne contrôlée est alors retenue sur place ou dans un local de police pendant le temps strictement nécessaire à l'établissement de son identité. La vérification ne peut cependant pas excéder un délai maximum de 4 heures.

ATTENTION : le contrôle, comme la vérification d'identité, doivent donner lieu à un procès-verbal qui doit préciser leur motif et leur contexte. Vous pouvez refuser de le signer de même que vous avez le droit d'en demander une copie.